Actes et Paroles, vol 3 | Page 8

Victor Hugo
de la porte toute grande ouverte du s��pulcre, une porte blanche �� c?t�� de la porte noire; il n'a pas voulu qu'il f?t dit que pas un coeur n'��tait mis��ricordieux pour ceux qui saignent, que pas un foyer n'��tait hospitalier pour ceux qui tombent; �� l'heure o�� l'on ach��ve les mourants, il s'est fait ramasseur de bless��s; cet homme de 1871, qui est le m��me que l'homme de 1848, pense qu'il faut combattre les insurrections debout et les amnistier tomb��es; c'est pourquoi il a commis ce crime, ouvrir sa maison aux vaincus, offrir un asile aux fugitifs. De l�� l'exasp��ration des vainqueurs. Qui d��fend les malheureux indigne les heureux. Ce forfait doit ��tre chati��. Et sur l'humble maison solitaire, o�� il y a deux berceaux, une foule s'est ru��e, criant tous les cris du meurtre, et ayant l'ignorance dans le cerveau, la haine au coeur, et aux mains des pierres, de la boue et des gants blancs.
L'assaut a manqu��, point par la faute des assi��geants. Si la porte n'a pas ��t�� enfonc��e, c'est que la poutre est arriv��e trop tard; si un enfant n'a pas ��t�� tu��, c'est que la pierre n'a point pass�� assez pr��s; si l'homme n'a pas ��t�� massacr��, c'est que le soleil s'est lev��.
Le soleil a ��t�� le trouble-f��te.
Concluons.
Laquelle de ces deux foules est la populace? Entre ces deux multitudes, les mis��rables de Paris et les heureux de Bruxelles, quels sont les mis��rables?
Ce sont les heureux.
Et l'homme de la place des Barricades avait raison de leur jeter ce mot m��prisant au moment o�� l'assaut commen?ait.
Maintenant, entre ces deux sortes d'hommes, ceux de Paris et ceux de Bruxelles, quelle diff��rence y a-t-il?
Une seule.
L'��ducation.
Les hommes sont ��gaux au berceau. A un certain point de vue intellectuel, il y a des exceptions, mais des exceptions qui confirment la r��gle. Hors de l��, un enfant vaut un enfant. Ce qui, de tous ces enfants ��gaux, fait plus tard des hommes diff��rents, c'est la nourriture. Il y a deux nourritures; la premi��re, qui est bonne, c'est le lait de la m��re; la deuxi��me, qui peut ��tre mauvaise, c'est l'enseignement du ma?tre.
De l��, la n��cessit�� de surveiller cet enseignement.

VI
On pourrait dire que dans notre si��cle il y a deux ��coles. Ces deux ��coles condensent et r��sument en elles les deux courants contraires qui entra?nent la civilisation en sens inverse, l'un vers l'avenir, l'autre vers le pass��; la premi��re de ces deux ��coles s'appelle Paris, l'autre s'appelle Rome. Chacune de ces deux ��coles a son livre; le livre de Paris, c'est la D��claration des Droits de l'Homme; le livre de Rome, c'est le Syllabus. Ces deux livres donnent la r��plique au Progr��s. Le premier lui dit Oui; le second lui dit Non.
Le progr��s, c'est le pas de Dieu.
Les r��volutions, bien qu'elles aient parfois l'allure de l'ouragan, sont voulues d'en haut.
Aucun vent ne souffle que de la bouche divine.
Paris, c'est Montaigne, Rabelais, Pascal, Corneille, Moli��re, Montesquieu, Diderot, Rousseau, Voltaire, Mirabeau, Danton.
Rome, c'est Innocent III, Pie V, Alexandre VI, Urbain VIII, Arbuez, Cisneros, Lainez, Grillandus, Ignace.
Nous venons d'indiquer les ��coles. A pr��sent voyons les ��l��ves. Confrontons.
Regardez ces hommes; ils sont, j'y insiste, ceux qui n'ont rien; ils portent tout le poids de la soci��t�� humaine; un jour ils perdent patience, sombre r��volte des cariatides; ils s'insurgent, ils se tordent sous le fardeau, ils livrent bataille. Tout �� coup, dans la fauve ivresse du combat, une occasion d'��tre injustes se pr��sente; ils s'arr��tent court. Ils ont en eux ce grand instinct, la r��volution, et cette grande lumi��re, la v��rit��; ils ne savent pas ��tre en col��re au del�� de l'��quit��; et ils donnent au monde civilis�� ce spectacle sublime qu'��tant les accabl��s, ils sont les mod��r��s, et qu'��tant les malheureux, ils sont les bons.
Regardez ces autres hommes; ils sont ceux qui ont tout. Les autres sont en bas, eux ils sont en haut. Une occasion se pr��sente d'��tre laches et f��roces; ils s'y pr��cipitent. Leur chef est le fils d'un ministre; leur autre chef est le fils d'un s��nateur; il y a un prince parmi eux. Ils s'engagent dans un crime, et ils y vont aussi avant que la bri��vet�� de la nuit le leur permet. Ce n'est pas leur faute s'ils ne r��ussissent qu'�� ��tre des bandits, ayant r��v�� d'��tre des assassins. Qui a fait les premiers? Paris.
Qui a fait les seconds? Rome.
Et, je le r��p��te, avant l'enseignement, ils se valaient. Enfants riches et enfants pauvres, ils ��taient dans l'aurore les m��mes t��tes blondes et roses; ils avaient le m��me bon sourire; ils ��taient cette chose sacr��e, les enfants; par la faiblesse presque aussi petits que la mouche, par l'innocence presque aussi grands que Dieu.
Et les voil�� chang��s, maintenant qu'ils sont hommes; les uns sont doux, les autres sont barbares. Pourquoi? c'est que leur ame s'est ouverte, c'est que leur esprit s'est satur�� d'influences dans
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